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Restauration Métaphysique
Restauration Métaphysique
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26 juin 2007

15. L’angoisse de l’être : une angoisse métaphysique

Tout homme est confronté à l’angoisse de l’être[1], à l’angoisse d’être que Pascal a si bien décrite : « Je ne sais qui m’a mis au monde, ni ce que c’est que le monde, ni que moi-même ; je suis dans une ignorance terrible de toutes choses ; je ne sais ce que c’est que mon corps, que mes sens, que mon âme que cette partie même de moi qui pense ce que je dis, qui fait réflexion sur tout et sur elle-même, et ne se connaît non plus que le reste.

« Je vois ces effroyables espaces de l’univers qui m’enferment, et je me trouve attaché à un coin de cette vaste étendue, sans que je sache pourquoi je suis plutôt placé en ce lieu qu’en un autre, ni pourquoi ce peu de temps qui m’est donné à vivre m’est assigné à ce point plutôt qu’en un autre de toute l’éternité qui m’a précédé et de tout celle qui me suit. Je ne vois que des infinités de toutes parts, qui m’enferment comme un atome et comme une ombre qui ne dure qu’un instant sans retour. Tout ce que je connais est que je dois bientôt mourir ; mais ce que j’ignore le plus est cette mort même que je ne saurais éviter. (in Pensées, Article III De la nécessité du pari, 194-427).

Cette angoisse est métaphysique. L’homme a besoin de découvrir le sens de la vie ; il a besoin de trouver un sens à sa vie. Qui suis-je ? Chacun demeure une énigme à soi-même. L’homme s’interroge sur sa raison d’être et fait l’expérience d’une inquiétude existentielle, d’un « mal-être ». L’intelligence humaine tend naturellement  à dépasser les limites du monde sensible et à se poser des questions qui dépassent le donné sensible. L’intelligence humaine cherche à connaître le pourquoi des choses et pas uniquement le comment. La vraie question qui hante l’homme ce n’est pas celle du comment (à laquelle s’efforce de répondre la science) mais celle plus fondamentale du pourquoi, à laquelle la science ne sait répondre. Pourquoi ? C’est la question préférée des enfants, celle qui désempare le plus les adultes.

Seule la métaphysique peut essayer de répondre à cette question. C’est pourquoi elle constitue un besoin essentiel de l’homme. Tous les grands philosophes le reconnaissent. Kant qui a pourtant contribué à la discréditer.n’en reconnaissait pas moins le caractère irréductible du questionnement métaphysique. L’homme est un être métaphysique. Heidegger dans Qu’est ce que la métaphysique ? soutient que : « La métaphysique appartient à la « nature de l’homme ». (…) La métaphysique est l’événement fondamental de notre existence. Elle est notre existence même. »

Cette inquiétude métaphysique peut parfois prendre la forme d’une révolte. Pour Albert Camus (1967) « La révolte métaphysique est le mouvement par lequel un homme se dresse contre sa condition et la création tout entière. Elle est métaphysique parce qu’elle conteste les fins de l’homme et de la création. »  in L’homme révolté.

La condition de l’homme est-elle pour autant une condition « d’humilié », comme l’affirme Freud du fait des trois découvertes majeures qu’ont été l’héliocentrisme, l’évolution et la psychanalyse ?

Tout d’abord, il convient d’observer que ces trois découvertes n’ont pas le même statut scientifique.

La théorie héliocentrique de Copernic est incontestable, elle est démontrée scientifiquement.

La théorie de l’évolution de Darwin, en revanche, est loin d’être démontrée, même dans ces derniers raffinements tels que la théorie des équilibres ponctués. Elle est même une « théorie en crise ». Dans son ouvrage Evolution : une théorie en crise[2], Michael Denton (1985) peut conclure ainsi : « Depuis 1859, pas une seule découverte empirique ni un seul progrès scientifique n’ont apporté la moindre validation aux deux axiomes de base de la théorie macro-évolutionniste de Darwin : d’une part le concept de continuité de la nature, c’est-à-dire l’idée d’un continuum fonctionnel de formes de vie enchaînant toutes les espèces et remontant jusqu’à la cellule primordiale ; et, d’autre part, l’idée que le projet adaptatif de la vie est entièrement le résultat d’un processus aléatoire aveugle. En dépit d’un siècle d’efforts intensifs de la part des biologistes évolutionnistes, les principales objections soulevées par les critiques de Darwin comme Agassiz, Pictet, Bronn et Richard Owen n’ont pas été réfutées. »

C’est encore plus vrai de la psychanalyse qui apparaît de plus en plus comme un système de croyances pseudo-scientifiques, une sorte de religion avec son clergé enfermé dans sa tour d’ivoire. Pour étayer mon propos, je ne citerai que les conclusions du rapport de l’association psychanalytique internationale publié en 2002 dont l’auteur principal est le psychanalyste P. Fonagy : « Il n’y a pas d’étude qui permette de conclure sans équivoque que la psychanalyse soit efficace par rapport à un placebo actif ou une autre forme de traitement. Il n’y a pas de méthodes disponibles qui pourraient d’une manière incontestable indiquer l’existence d’un processus psychanalytique.

« La plupart des études ont des limitations majeures qui pourraient conduire ceux qui critiquent la discipline à ne pas prendre en compte les résultats. D’autres études ont des limitations si graves que même un évaluateur qui a de la sympathie pour la psychanalyse pourrait être enclin à ne pas tenir compte de leurs résultats.

« En tant que psychanalystes, nous savons tous que la psychanalyse marche. Notre propre expérience de l’analyse est probablement suffisante dans la plupart des cas à nous persuader de son efficacité. [3]»

Par conséquent, la seule révolution scientifique qui soit avérée est l’héliocentrisme, laquelle ne montre pas que l’Univers n’a pas été créé pour l’homme, mais que la terre tourne autour du soleil. Cette disposition du cosmos peut donner lieu à d’innombrables spéculations qui ne conduisent pas nécessairement à un sentiment d’humiliation. L’héliocentrisme peut tout aussi bien symboliser et rappeler la dépendance ontologique de l’homme. L’homme tourne autour de la source de lumière, elle qui rend la vie possible ; et il lui est donné d’éprouver la nuit pour mieux encore apprécier le jour. En fait, ce que l’homme expérimente à travers l’héliocentrisme c’est l’humilité. Freud, à l’instar de Nietzsche, ne semble pas avoir compris la différence entre humilité et humiliation.    

L'humiliation fait bien sûr partie de la condition humaine. Mais chaque homme s'y trouve davantage confronter au quotidien dans les épreuves de la vie. L'humiliation est de l'ordre de l'expérience personnelle et intime.




[1] Cette chronique est en partie une réponse aux commentaires d’Edouard sur notre chronique n°13.

[2] Voir notamment Michael Denton (1985), Evolution : A theory in crisis, Ed, Burnett Books. Traduction chez Flammarion en 1992.

[3]  P. Fonagy et coll. « An open door review of outcome studies in psychoanalysis, 2002. Document disponible :ipa@ipa.org.uk. Voir aussi Rapport INSERM, 2004, Psychotérapie : Trois approches évaluées », Résumé en ligne :www.inserm.fr. Voir également Le livre noir de la psychanalyse, 2005, (sous la direction d Catherine Meyer), éditions les arènes dont le sous-titre est « Vivre, penser et aller mieux sans Freud. ». Cet  ouvrage collectif  qui rassemble des contributions de spécialistes  montre que la psychanalyse est dépassée et de plus en plus déconsidéré dans le monde en tant que thérapie et de ce fait en perte de vitesse, sauf en France et en Argentine…

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